Deuil de la fertilité
Lorsque Nicolas m'a demandé si j'avais envie qu'on commence nos démarches pour adopter des enfants, il savait certainement mieux que quiconque que mon deuil d'une grossesse était accompli. Nombre d'années que j'ai pris pour faire ce deuil ? 15 ans. 15 longues années multipliées par 12 mois. Ça fait beaucoup de deuils... J'ai réellement cru ne jamais réussir à surmonter ces deuils à répétition. Et pourtant...
Depuis, j'ai lu. Beaucoup. Et dernièrement, je suis tombée sur un livre que je n'avais encore jamais lu. Une psychanalyste expliquait que la place de l'enfant naturel ne serait jamais comblée, et qu'il fallait seulement accepter ce vide. L'enfant adopté prenait une autre place, mais pas celle de l'enfant naturel. Je suis d'accord.
Je ne connaîtrai jamais la grossesse, l'enfant en soi, qui grandit de soi, qui se nourrit par soi. Je ne connaîtrai jamais l'accouchement, les fluctuations hormonales, l'enfant en tant que "partie de soi". Je parlais dernièrement avec Nicolas des craintes que j'avais concernant nos enfants. Je lui disais qu'une part de moi avait peur de ne pas les aimer... On ne sait jamais ! Et si je ne les aimais pas ? Et si je n'arrivais pas à développer de liens avec eux ? Et Nicolas m'a rappelé à quel point j'aime notre chien, Papus... Et ce n'est "qu'un chien" ! Et à quel point j'aime Victor...
C'est donc dire que l'amour qu'on peut éprouver pour un enfant n'a rien à voir avec le fait qu'il soit né de soi. J'avais déjà réfléchi à ces questions, mais maintenant que tout est réel, elles reviennent d'elles-mêmes. Elles sont nécessaires.
J'aurais aimé qu'un enfant grandisse en moi. J'aurais aimé l'allaiter. Ce désir ne disparaîtra certainement jamais. Et pourtant, alors que notre Gouvernement annonce qu'il paiera enfin les trois premières fécondations in vitro aux couples infertiles, je n'ai pas envie d'essayer : mes deux enfants m'attendent en Colombie.
Nadyne